Présentez-nous
les moments marquants de votre parcours dans la profession.
Ma première approche du
métier a eu lieu à l’école hôtelière de Saint-Méen-Le-Grand, en Ille et Vilaine.
On est alors entre 1978
et 1980, dans une école toute neuve, et on était à peine une petite quarantaine
d’élèves. La personne qui m’a marqué là-bas était l’ancien maître d’hôtel de
Michel Kerever, à l’époque deux étoiles Michelin près de Rennes. Ce Monsieur
m’a mis le premier guide Relais & Châteaux dans les mains, et tous les
stages que l’on devait faire, il nous poussait à viser les grands restaurants
et les Relais & Châteaux, et c’est là que j’ai commencé à m’imprégner de
cette culture de l’excellence.
Ce chemin, je ne
pourrais plus m’en détacher, qui plus est après ma rencontre avec un grand
homme, à l’âge de 17 ans : Monsieur Bernard Loiseau. Je suis allé en stage
chez lui à partir de 1981, et je suis revenu après l’armée pour y passer une
nouvelle fois deux années. C’est lui qui a façonné une partie de mon goût, de
mon palais. Cette rencontre était énorme pour moi à l’époque, et je m’en rends
encore compte chaque jour aujourd’hui. C’est lui qui m’a donné la passion,
l’envie, l’enthousiasme, la culture du produit…en fait, c’est lui qui m’a tout
donné !
Le dernier moment
marquant, incontestablement, c’est ma rencontre avec Martine. Ça s’est passé chez Philippe Bohrer, avec qui
j’avais travaillé chez Loiseau et chez qui j’ai ensuite passé un an, à la Ville
de Lyon, son restaurant. On peut dire que c’est lui qui m’a présenté mon
épouse.
Pour moi, une carrière
de restaurateur ne s’envisage qu’à deux. Vous savez, dans ce métier, on reçoit
tous les jours, deux fois par jour et, nous, on a toujours voulu garder cet
esprit « comme à la maison », avec la même envie, la même attention
pour nos clients que pour nos amis, notre famille.
En
cette saison, quels sont vos produits et plats préférés ?
En cette fin d’hiver, je
me fais plaisir avec les légumes secs de qualité, comme le haricot blanc ou le
petit épeautre de Haute-Provence, que j’ai toujours beaucoup travaillé grâce à
l’association « Slowfood » à laquelle je participe activement.
Ce qui me plaît aussi beaucoup
en ce moment, ce sont ces graines de quinoa blondes et rouges, en culture
équitable, que j’ai trouvées chez un fournisseur. Je les sers en salade, avec
des endives et une vinaigrette au curry, cela accompagne superbement bien mon tartare
de saumon fumé et une rillette de saumon frais, sur un pain noir légèrement
grillé, pain que je fais moi-même bien sûr.
Avec une dernière
lamelle de saumon frais sur le dessus, ça fait comme un sushi et ça plait
beaucoup.
Donnez-nous
un petit conseil de pros pour rendre notre cuisine de tous les jours meilleure.
Pour bien réussir vos
légumes racines (topinambour, panais, rutabaga, …) je vous conseille de les
couper en petits cubes, de les laver, et de les cuire à couvert et très
doucement, au four (1h / thermostat 5-6) dans une cocotte Staub, avec une belle
huile d’olive.
Les picots sous le
couvercle de la cocotte Staub apportent un côté étuvé à la cuisson et avec ces
légumes, c’est excellent. Il faudra vérifier la cuisson de temps en temps, mais
vous arriverez alors à les faire compoter et caraméliser tout en en gardant le
craquant.
Citez-nous
un des jeunes employés de la maison dont vous êtes particulièrement fier.
Je suis fier de tout mon
personnel, vraiment, ils sont toujours disponibles, motivés et je n’ai aucun
absentéisme ; quand je parle de ça avec d’autres chefs d’entreprises, je
me rends bien compte que c’est une chance et un signe qui compte.
Si je dois vous citer
une grande fierté passée, je vous parlerais de Nik, un jeune thaïlandais passé
chez moi de 2005 à 2007. Il arrivait de Thaïlande, ne sachant absolument pas
parler le français. On a pris le temps avec la famille de l’accompagner pour lui
apprendre notre culture et, au bout du compte, grâce à sa persévérance il a
obtenu le titre de « Meilleur Apprenti de France ».
C’était un vrai rayon de
soleil, toujours souriant et plein d’entrain. Aujourd’hui, il continue à
travailler en cuisine, et il a repris ses études d’avocat, car c’est ce qu’il
voulait faire étant plus jeune ; franchement, je lui tire mon chapeau.
Avez-vous
un souvenir, une anecdote à relater à la jeune génération de gastronomes ?
Mon plus grand souvenir
de gastronome est incontestablement ma rencontre avec Bernard Loiseau. Je pense
très souvent à lui, qui plus est en ce moment, car cela fait pile dix ans qu’il
nous a quittés. Son enthousiasme pour le métier, pour le produit, était
vraiment contagieux. Je me souviens encore qu’en 1981, on prenait la
camionnette pour « faire » Rungis. On montait le vendredi et quand on
débarquait la marchandise à la Côte d’Or, il fallait voir son sourire, ses yeux
rieurs et gourmands…je les vois encore !
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