jeudi 7 mars 2013

Rencontre avec Bernard Leray, de La Nouvelle Auberge



Présentez-nous les moments marquants de votre parcours dans la profession.

Ma première approche du métier a eu lieu à l’école hôtelière de Saint-Méen-Le-Grand, en Ille et Vilaine.
On est alors entre 1978 et 1980, dans une école toute neuve, et on était à peine une petite quarantaine d’élèves. La personne qui m’a marqué là-bas était l’ancien maître d’hôtel de Michel Kerever, à l’époque deux étoiles Michelin près de Rennes. Ce Monsieur m’a mis le premier guide Relais & Châteaux dans les mains, et tous les stages que l’on devait faire, il nous poussait à viser les grands restaurants et les Relais & Châteaux, et c’est là que j’ai commencé à m’imprégner de cette culture de l’excellence.

Ce chemin, je ne pourrais plus m’en détacher, qui plus est après ma rencontre avec un grand homme, à l’âge de 17 ans : Monsieur Bernard Loiseau. Je suis allé en stage chez lui à partir de 1981, et je suis revenu après l’armée pour y passer une nouvelle fois deux années. C’est lui qui a façonné une partie de mon goût, de mon palais. Cette rencontre était énorme pour moi à l’époque, et je m’en rends encore compte chaque jour aujourd’hui. C’est lui qui m’a donné la passion, l’envie, l’enthousiasme, la culture du produit…en fait, c’est lui qui m’a tout donné !

Le dernier moment marquant, incontestablement, c’est ma rencontre avec Martine. Ça  s’est passé chez Philippe Bohrer, avec qui j’avais travaillé chez Loiseau et chez qui j’ai ensuite passé un an, à la Ville de Lyon, son restaurant. On peut dire que c’est lui qui m’a présenté mon épouse.
Pour moi, une carrière de restaurateur ne s’envisage qu’à deux. Vous savez, dans ce métier, on reçoit tous les jours, deux fois par jour et, nous, on a toujours voulu garder cet esprit « comme à la maison », avec la même envie, la même attention pour nos clients que pour nos amis, notre famille. 







En cette saison, quels sont vos produits et plats préférés ?

En cette fin d’hiver, je me fais plaisir avec les légumes secs de qualité, comme le haricot blanc ou le petit épeautre de Haute-Provence, que j’ai toujours beaucoup travaillé grâce à l’association « Slowfood » à laquelle je participe activement.

Ce qui me plaît aussi beaucoup en ce moment, ce sont ces graines de quinoa blondes et rouges, en culture équitable, que j’ai trouvées chez un fournisseur. Je les sers en salade, avec des endives et une vinaigrette au curry, cela accompagne superbement bien mon tartare de saumon fumé et une rillette de saumon frais, sur un pain noir légèrement grillé, pain que je fais moi-même bien sûr.
Avec une dernière lamelle de saumon frais sur le dessus, ça fait comme un sushi et ça plait beaucoup.


Donnez-nous un petit conseil de pros pour rendre notre cuisine de tous les jours meilleure.

Pour bien réussir vos légumes racines (topinambour, panais, rutabaga, …) je vous conseille de les couper en petits cubes, de les laver, et de les cuire à couvert et très doucement, au four (1h / thermostat 5-6) dans une cocotte Staub, avec une belle huile d’olive.
Les picots sous le couvercle de la cocotte Staub apportent un côté étuvé à la cuisson et avec ces légumes, c’est excellent. Il faudra vérifier la cuisson de temps en temps, mais vous arriverez alors à les faire compoter et caraméliser tout en en gardant le craquant.  



Citez-nous un des jeunes employés de la maison dont vous êtes particulièrement fier.

Je suis fier de tout mon personnel, vraiment, ils sont toujours disponibles, motivés et je n’ai aucun absentéisme ; quand je parle de ça avec d’autres chefs d’entreprises, je me rends bien compte que c’est une chance et un signe qui compte.

Si je dois vous citer une grande fierté passée, je vous parlerais de Nik, un jeune thaïlandais passé chez moi de 2005 à 2007. Il arrivait de Thaïlande, ne sachant absolument pas parler le français. On a pris le temps avec la famille de l’accompagner pour lui apprendre notre culture et, au bout du compte, grâce à sa persévérance il a obtenu le titre de « Meilleur Apprenti de France ».
C’était un vrai rayon de soleil, toujours souriant et plein d’entrain. Aujourd’hui, il continue à travailler en cuisine, et il a repris ses études d’avocat, car c’est ce qu’il voulait faire étant plus jeune ; franchement, je lui tire mon chapeau.


Avez-vous un souvenir, une anecdote à relater à la jeune génération de gastronomes ?

Mon plus grand souvenir de gastronome est incontestablement ma rencontre avec Bernard Loiseau. Je pense très souvent à lui, qui plus est en ce moment, car cela fait pile dix ans qu’il nous a quittés. Son enthousiasme pour le métier, pour le produit, était vraiment contagieux. Je me souviens encore qu’en 1981, on prenait la camionnette pour « faire » Rungis. On montait le vendredi et quand on débarquait la marchandise à la Côte d’Or, il fallait voir son sourire, ses yeux rieurs et gourmands…je les vois encore !


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