mercredi 27 mars 2013

Rencontre avec Daniel Rebert



Présentez-nous les moments marquants de votre parcours dans la profession.

Il y a un moment particulièrement fort dans cette vie professionnelle, c’est le vrai début, en 1986, quand j’ai repris l’entreprise paternelle. Ce passage de témoin, c’est le moment où je suis devenu chef d’entreprise et cela marque forcement une vie. Mon père n’était pas loin, mais il a tout de même quitté l’entreprise assez rapidement finalement. J’ai alors repris l’affaire avec une grande envie de la développer. A l’époque, nous étions une belle petite boulangerie de quartier, aujourd’hui, je suis particulièrement heureux de constater que nous avons un nom qui compte dans la profession, en Alsace, mais pas seulement.

L’année 1992 fut déterminante également, car c’est celle où j’ai intégré les « Etoiles d’Alsace », grâce à Fernand Mischler, mais, surtout, c’est cette année que nous avons participé aux Jeux Olympiques d’Albertville. Tous ensembles, nous avons tenu un restaurant gastronomique VIP et éphémère, à Val d’Isère, au pied de la descente olympique, la fameuse « face de Bellevarde ».
J’y suis allé avec toute mon équipe pour m’occuper des pâtisseries, et, pendant deux semaines, nous avons servi près de 15 000 couverts. Vous pourrez demander aux autres membres présents, ce fut un moment très fort pour chacun d’entre nous. C’était un tel défi que cela a vraiment resserré les liens de ceux qui ont vécu cette aventure.

Il y a eu aussi mon intronisation, en septembre 2001 aux « Relais Desserts ». J’ai eu la chance d’être accepté dans cette association, regroupant les plus grands noms mondiaux de la profession et prônant la « Haute Pâtisserie ». On se retrouve régulièrement et ce sont des moments vraiment très fructueux où, l’on échange nos idées, nos technicités propres. On se serre les coudes entre grands professionnels et on en retire toujours quelques idées nouvelles qui font la différence plus tard.
Cette saine émulation me ravit et me pousse sans cesse à vouloir faire partie des meilleurs.


En cette saison, quels sont vos produits et plats préférés ?

Là, maintenant, tout de suite, je mangerais bien une part de ma tarte Rhubarbe/Chiboust. Cette tarte, c’est le printemps qui arrive…Je l’apprécie particulièrement, car elle a tous les attraits et le peps de la tarte à la rhubarbe, avec ce petit côté acidulé, auquel on ajoute le plaisir entier de la crème Chiboust à la vanille. La Chiboust - très rarement travaillée dans la région - est une crème pâtissière très riche, que j’ai allégée au maximum avec des blancs d’œufs montés en neige.




Sinon, en ce moment, j’ai comme tout le monde de grandes envies de chocolat, et dans ce cas-là, en attendant les fêtes de Pâques, je me fais plaisir avec mon « Palet Or », avec sa ganache fondante faite avec un chocolat de St Domingue. J’aime particulièrement cette provenance, j’aime la pureté du « criollo », sa longueur en bouche et cette douce puissance qu’il développe sans brutalité.


Donnez-nous un petit conseil de pros pour rendre notre cuisine de tous les jours meilleure.

Parlons d’une simple tarte : je conseille toujours de faire sa pâte soi-même au lieu de l’acheter en supermarché. Il vous faudra alors travailler au beurre, au bon beurre, le meilleur que vous trouvez et ne pas essayer d’économiser là-dessus, car beaucoup du plaisir à la dégustation se joue là. Il vaut mieux en manger moins souvent, mais se faire vraiment plaisir avec de bons produits. Et si vous travaillez au beurre, il faut toujours essayer de faire votre pâte le jour d’avant et de la laisser reposer une nuit au frigo.

Ensuite, le dernier conseil primordial pour la réussite de votre tarte, c’est de toujours faire précuire la pâte, la cuire à blanc. Étalez la pâte dans un moule, mettez une feuille de papier-cuisson par-dessus et répandez des haricots secs dessus, puis enfournez pendant une demi-heure, à 160° (thermostat 6) environ pour un moule de taille normale. Avec ces petites astuces, vous goûterez la différence…

Dernier point, et non des moindres, il vous faudra toujours faire attention à l’emplacement où vous stockerez votre beurre, votre chocolat ou votre gâteau dans le frigo, car ces produits sont des aspirateurs de saveurs. Faites bien attention alors de ne pas mettre vos préparations (à moins de les filmer et de les mettre dans des boites) ou vos pâtisseries à côté  de la viande, du poisson, du fromage. Si vous n’avez pas de place au frais, en ce moment, il vaudra presque mieux laisser cela à la cave ou la nuit sur le balcon (en le protégeant bien évidemment) pour s’assurer du meilleur goût le lendemain.





Citez-nous un des employés de la maison dont vous êtes particulièrement fier.
   
Même si chacune et chacun de nos employés a de l’importance, je voudrais vous citer mon second, Alain Beetz. C’est vraiment mon bras droit et mon chef de production, et il faut avouer que si la Pâtisserie Daniel Rebert a une telle renommée aujourd’hui, c’est aussi grâce à lui.
C’est quelqu’un qui a beaucoup de talent, qui est très créatif et qui à la rigueur nécessaire pour faire un grand professionnel. Il a 44 ans, dont 29 passés à nos côtés ; il est venu faire son apprentissage chez nous et je ne l’ai jamais laissé partir depuis !

Avez-vous un souvenir, une anecdote à relater à la jeune génération de gastronomes ?

Des grands moments de bonheur à table, j’ai eu la chance d’en vivre plein dans mon existence, mais vous savez, je pense que, déjà, quand c’est bon et que c’est partagé avec des gens qu’on apprécie, même si c’est simple, c’est toujours le pied !

Sinon il y a un moment qui me revient souvent en mémoire, c’est quand nous sommes allés faire « L’Alsace au Japon » en 1997. Vivre ces instants avec mes collègues "Etoiles d'Alsace", participer à l’aventure, voir Emile Jung, par exemple, inventer une sauce en quelques instants, à la dernière minute, la goûter ensemble, vivre ces moments où un simple petit coup de génie fait la différence….c’était passionnant.
Enfin nous retrouver tous ensemble, à présenter le meilleur de la haute gastronomie alsacienne, au 60ème étage d’un grand hôtel de Tokyo, avec une vue formidable et le couché de soleil sur la ville, c’est une image qui reste toujours aussi précisément gravée dans ma mémoire...
  

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